lundi 31 mars 2008

Emue par la muco. J. Heuchel

le 31.03.90

La journée fut riche en événements. Déjà la veille, la jeune Christelle est revenue à Giens en convalescence de greffe. Elle qui avait peur de l'intervention et qui enviait le calme de Jean-Jacques à affronter ses angoisses, elle les a vaincues. Elle rayonne de santé, de joie, de soulagement. Bien sûr elle est fatiguée, elle a perdu deux kilos après la greffe, mais elle les reprendra vite. Bien sûr elle ne parle pas trop de son séjour à la Timone mais ses yeux (avec le masque anticontamination on ne voit pas son nez ni sa bouche) trahissent une véritable joie. Cela m'emplit d'espoir. Par contre la petite Anne Croce a l'air beaucoup affaiblie. Il faut dire qu'elle a attendu, intubée en réanimation, la greffe pendant plusieurs jours, alors que Christelle marchait encore lorsqu'elle a été transplantée. De plus, elle doit seulement réaliser maintenant à quel point Maud lui manquera à l'avenir. Maud, sa soeur décédée une dizaine de jours avant sa greffe faute d'avoir pu trouver un donneur... J'espère qu'elle remontera la pente, mais la côte est raide. Enfin, elle a déjà le soutien de ses parents, qui sont exemplaires, pour reconstruire sa vie.
C'est aussi hier que j'ai donné à la surveillante du service mon autorisation de greffe. cette fois-ci, si Noirclerc se plante et loupe ma greffe, mes parents ne pourront même pas leur faire un procès !
Mais je m'égare. Aujourd'hui donc j'ai été invité par les Siméoni, parents de Laurent greffé en mars 1989, à passer la journée avec eux. Ce fut très agréable, ces gens sont vraiment (eux aussi !) exemplaires. Ils sont sensés, généreux, simples (c'est à dire qu'ils ne te disent pas quarante fois par jours qu'ils ont été très fort lors de la greffe de leur fils - même si c'est vrai), ouverts et compréhensifs, mais surtout dynamiques. A tel point qu'ils m'ont emmené voir un match de volley-ball où jouait Olivier, leur fils aîné qui lui n'a pas la mucoviscidose. Or, depuis que je connais le sens du mot sport, je le hais. C'est de la jalousie, je le sais, mais il n'empêche que de voir des types passer leur loisir à se renvoyer une baballe en l'air, çà me sidère. En fait, çà m'énerve et çà m'ennuie. Pourtant l'esprit sportif - tenter de se surpasser, être beau joueur, vouloir s'améliorer - s'accorde assez bien avec mes ambitions. Mais je ne pratique cela que d'un point de vue mental, d'autres diront psychologique.
Donc, m'ennuyant ferme, je suis sorti prendre l'air hors du gymnase. A peine sorti j'ai remarqué trois ou quatre jeunes filles (entre 11 et 13 ans, ai-je su plus tard) se moquer de moi. Mon look de muco les amusait beaucoup. Ma chemise trop grande, ma maigreur, mon air indifférent et paumé les ont beaucoup fait rire. finalement, l'une d'elle est venue vers moi et m'a dit :
"Eh, y'a ma copine qui voudrait sortir avec toi.
- Je suis trop cher, ai-je répondu.
- T'es déjà sorti avec une fille ? T'as une copine ?
- Oui pour la première et non pour la seconde. je suis célibataire parce que je n'ai pas les moyens d'entretenir une fille, ni de lui faire des cadeaux. "
Et la conversation s'est arrêtée là.
De retour dans la salle, elles m'ont à nouveau branché :
"Eh, t'as quel âge ?
- 19.
- C'est pas vrai, tu te fous de moi."
Là j'ai sorti mon permis de conduire. J'étais vexé. J'ai l'habitude, mais je n'aime pas qu'on me prenne pour un gosse de 14 ans. La conversation était lancée. Devant l'énigme de la contradiction entre mon physique et mes papiers d'identité, elles ont voulu en savoir plus.
Au départ, j'ai éludé les questions, leur racontant que je squattais chez un pote à Giens, que j'avais arrêté les études en terminale parce que ça m'avait trop fait chier, etc. mais elles m'ont paru finalement sympathiques et j'ai fini par leur dire, en quelques phrases, que si j'avais 19 ans, je n'en aurai peut-être jamais 20; que j'étais à l'hôpital depuis trois mois et que mon seul espoir était la greffe. Le tout balancé froidement, sans préambule.
En cet instant, elles sont passées de la moquerie à l'incrédulité et à la tristesse. C'est vraiment amusant de voir la tête des gens quand ils réalisent qu'ils parlent à un type qui peut claquer à chaque instant (un bon pneumo, une belle hémoptysie). D'un seul coup, elles ont vu qu'un type qui avait presque leur âge (et qui en plus paraissait leur âge) pouvait crever. L'image de leur propre mort leur est revenue en pleine face sans qu'elles s'en rendent compte. Enfin, après avoir vu mon cathlon, mes cicatrices, mes marques de piqûres et le reste, elles ont été convaincues. D'autant que les incohérences de mon premier baratin s'éclaircissaient à la lumière de cette histoire. Finalement, elles étaient sympa, elles se sont même excusées plusieurs fois de s'être foutues de ma gueule et m'ont souhaité bonne chance. Elles ont même essayé de me remonter le moral (et le leur par la même occasion). Puis, le match de volley achevé, je suis reparti. Et ce soir, tandis que je repense à elles, je réalise que moi aussi j'ai été marqué par elles. Pourtant la plus intelligente a 13 ans et est en sixième ! Mais elles avaient une innocence qui m'a ému. D'un coup elles ont réalisé leur chance. Mais l'une d'elle m'as dit quand je lui est expliqué que la mucoviscidose n'était pas contagieuse: "Toute façon c'est pas grave. J'm'en fou d'être comme toi".
Avait-elle des envies suicidaires ? Je ne sais pas. Avait-elle réellement compris ce qu'est la muco ? Je pense que oui. Alors j'ai la faiblesse de croire que je l'ai émue et qu'aujourd'hui elle a pris une leçon sur la vie. J'aime à penser qu'elle a compris que la chance ne fait rien à l'affaire. L'important c'est d'essayer de vivre le mieux possible, le plus longtemps possible. De faire ce qu'on peut pour aider les autres et se perfectionner soi-même. L'important, c'est ce qu'il y a en nous. N'importe quel brute de deux mètres n'est qu'une lavette si elle n'essaie pas de résister à une brute de deux mètres dix. Il faut affronter les emmerdes à bras le corps, si possible aider les autres à les affronter pour pouvoir mériter le respect d'autrui et pour se respecter soi-même. Mais il faut aussi savoir profiter des bons moments quand ils sont là et aujourd'hui fut un bon moment de vingt-quatre heures.

dimanche 30 mars 2008

Pleure ménagère ! J. Heuchel

le 30.03.90

Il est 1 heure du matin, ma perfusion de la nuit vient de s'achever. J'écoute Sting dans mon Walkman. je me sens bien.
Pourtant la journée d'hier, a été fatigante. Mais elle fut aussi pleine de joie. En effet, hier à midi, Stéphanie, greffée depuis un an et demi, Laurent, greffé depuis un an, Xavière, greffée depuis neuf mois, et Guy, greffé depuis six mois, sont venus à l'hôpital Renée-Sabran. Ils étaient réunis pour émission télévisée (qui passera sur la 2 ou la 5, on ne sait pas encore) et pour un article à paraître dans Le Figaro Magazine. La greffe et la muco se médiatisent. C'est vraiment une bonne chose, quoique je n'aime pas trop l'idée d'aller pleurer auprès du grand public. Je trouve çà impudique et je compare cela au voyeurisme (ou à l'exhibitionnisme) malsain des gens qui reluquent les photos des macchabées à Beyrouth. C'est sans doute mon atavisme normand, l'autosuffisance qui refait surface. Mais je me dis que l'on a besoin des journalistes et qu'en plus cette démarche ne profite pas qu'à moi, mais à tous les enfants en attente de greffe. Alors je joue le jeu. Ils ont besoin de faire pleurer les ménagères pour vendre. Nous on a besoin qu'elles pleurent pour vivre. Le contrat est honnête...
Or donc, j'ai passé la journée d'hier avec ces amis que je n'avais pas revus depuis septembre 89 pour certains et je suis vraiment heureux de les avoir vus tous les quatre ensemble. J'ai pris des photographies. J'espère qu'elles seront réussies car un tel événement est rare.
Le revers de la médaille c'est que le soir, de retour au Coty, j'ai fait une hémoptysie. J'ai craché 60 cc de sang. Mais cela ne me fait pas peur. Je n'ai pas saigné depuis et je connais des copains qui ont rempli des bassines de sang et qui sont encore là pour le raconter. J'ai quand même passé la nuit précédente au troisième étage, sous surveillance accrue. Mais ce soir je suis revenu au deux ! Cela m'a fait une nouvelle expérience; J'ai découvert des sensations inconnues jusque-là. Ce ronflement dans la poitrine, le sang qui gargouille et puis la toux, inévitable, le filet de sang qui s'écoule de ta bouche pour finir dans un petit récipient en plastique blanc. Contraste du sang rouge et du plastique blanc. Le sang, la vie qui s'écoule de toi inexorablement. Et puis le filet de sang diminue, le gargouillement aussi, fin de l'hémoptysie. La suite au prochain numéro. Il est maintenant 1 h 20. Je vais éteindre le Walkman, éteindre la lumière et dormir. 2teindre le conscient pour allumer et révéler l'inconscient. Contraste du rouge et du blanc. Contraste entre la vie et le linceul mortuaire.

vendredi 28 mars 2008

Le nerf de la guerre. J. Heuchel

le 28.03.90

Aujourd'hui, la jeune greffé Anne Croce est arrivée en convalescence à l'hôpital du docteur Chazalette. Je n'ai pas pu la voir, mais par contre j'ai parlé avec son père. Il va créer une fondation, la Fondation "Maud", dont le but sera de faciliter les dons d'organes pour les enfants (et pas uniquement les mucos). Son projet est très ambitieux mais il a déjà le "poids médiatique" nécessaire pour intéresser les TV et faire une grande émission pour lancer l'association. S'il réussit, seuls subsisteront les problèmes purement médicaux, et ceux-ci peuvent être résolus sans trop de problèmes (puisque de toute façon ils apprennent à chaque greffe, le système sera parfaitement au point dans un an). Un grand espoir s'ouvre devant nous. Avec l'association "Maud" on peut espérer que personne ne décède en attente de greffe ! C'est déjà beaucoup et même plus qu'on ne le pense. Car rien n'est plus ignoble, révoltant et désespérant que de voir quelqu'un agoniser en attendant un greffon qui ne viendra jamais. L'idée d'échapper à ce supplice m'a déjà réconforté. En outre, le week-end fini, le Coty semble moins désert et l'ambiance reprend. Ajoutons à cela la perspective d'une sortie à Toulon ou Hyères demain et le fait que je suis habitué aux antibiotiques et l'on comprendra que je me sente mieux.
D'autant que Stéphane, qui m'a tant manqué ce week-end, m'a écrit pour me dire que lui aussi a trouvé le dimanche long loin de nous. Décidément çà va mieux. Encore quelques jours et je monterai au troisième étage du Coty à pied.
Le moral remonte et avec la mucoviscidose c'est 20% de la guérison. Soyez déprimé, abattu, triste et sinistre,et les microbes vous rongent les poumons. mais soyez joyeux, dynamique, optimiste et fort, et l'efficacité des antibiotiques est multipliée par dix. Le moral des troupes, c'est le nerf de la guerre. Sans lui pas d'ardeur au combat et la défaite ou la désertion sont les seules issues. Ici la défaite, c'est la mort par asphyxie, et la désertion, c'est le suicide ou l'arrêt des soins, ce qui revient au même.
Et c'est là la force de Stéphane. c'est un combattant, un meneur d'hommes, un type qui sait donner aux autres la confiance et l'espoir en eux qu'ils ont perdus. Mais, en même temps, raisonnable, il sait s'économiser pour ménager ses forces et tenir le plus longtemps possible. Car, en fait, c'est cela le but du jeu : tenir toujours plus loin et toujours plus longtemps. C'est de ne pas baisser les bras tout en ayant conscience de la force machiavélique de l'adversaire. C'est de faire mentir la science qui vous dit "demain vous serez mort" et d'aller loin, toujours plus loin.

mardi 25 mars 2008

Culture ! (Antibio; Radio) J. Heuchel

le 25.03.90

Je suis toujours à Giens. Mon départ a été reporté une fois de plus. Les derniers examens sanguins montraient une réinfection pulmonaire. Je suis donc sous antibiothérapie lourde. Je suis seul. Après Jean-Jacques il y a deux semaines, ce fut au tour d'un autre ami à moi de rentrer chez lui. Il se nomme Stéphane Adam, mais se surnomme lui-même Estevan Nadamas. Bien sûr, je suis content pour lui qu'il soit de retour chez lui, mais je me sens un peu seul. Il reste bien ici quelques gens sympathiques et agréables, comme Frédéric, un garçon venu de Paris, mais sans Stéphane l'ambiance n'est plus ce qu'elle était. tout paraît plus long, le week-end n'en fini pas. De plus, les antibiotiques me fatiguent et me donnent des nausées. Je suis mal dans ma peau et mal dans ma tête. Je passe la journée à essayer de dormir pour retrouver en rêve l'ambiance de la semaine passée.
J'ai été faire un tour dans le parc cet après-midi pour essayer de me revigorer mais je reste fatigué. Cela devrai passer une fois que mon organisme sera accoutumé au produit que l'on m'injecte en perfusion. Il y a deux jours, vendredi soir, des journalistes sont venus nous voir. Ils travaillent à France-culture et vont diffuser, le 9 juin, une émission sur la mucoviscidose. Stéphane et moi avons été interrogés ainsi que Stéphanie, une jeune fille qui a été greffée. J'espère que l'émission sera faite intelligemment et que les journalistes ne diront pas de bêtises comme cela leur arrive parfois. J'espère aussi que je n'ai pas trop bafouillé et que mon message sur les dons d'organes sera entendu par le plus grand nombre d'auditeurs. Mais cela seul l'avenir nous le dira...

jeudi 20 mars 2008

Pas de pitié ! J. Heuchel

le 20.03.90

ça y est ! Je vais peut-être partir dimanche et rentrer à la maison. Cela fait bientôt trois mois que je suis là et franchement j'ai hâte de retrouver la brume normande. La Côte d'Azur c'est vraiment agréable, mais avoir la santé et dormir dans son vrai lit c'est encore plus agréable. D'autant que je n'ai jamais déménagé. J'ai toujours vécu là-haut (hormis un an d'hospitalisation ici même entre 2 et 14 mois) et c'est mon pays. Je l'aime. Je l'aime aussi et surtout pour les gens qui y habitent et avec qui je partage ma vie depuis plus de dix-huit ans : mes deux cousines : Laurence, qui se fait appeler Law, et Aude. elles ont été et seront mes meilleures amies. Nous avons évolué ensemble toute notre enfance. Notre osmose est complète. Nous avons vu les mêmes films, lu les mêmes livres, aimé les mêmes choses, fait les mêmes conneries... Et encore Laurence et moi sommes sans doute plus liés qu'un frère et une soeur, bien que l'on ne se le soit jamais avoué. Bien sûr, elle c'est elle et moi c'est moi ( surtout depuis que je viens à Giens et que j'ai fréquenté d'autres gens qui m'ont apporté d'autres choses) mais nous sommes quand même plus que des amis.
Pendant toute ma jeunesse je n'ai vécu que pour les jours (le dimanche après-midi) où l'on se retrouvais pour jouer. A quatre ans avec des peluches, à 8 avec des playmobil, à 12 avec des déguisements et depuis nos 16 ans avec les jeux de rôles.
Toujours en phase nous avons les mêmes délires et les mêmes imaginations. A nous trois nous pouvons tout créer, tout inventer. Lorsque nous jouons avec les jeux de rôles, pendant un après-midi je suis guéri. Je n'ai plus la mucoviscidose, je suis un démiurge qui façonne le monde. Je rêve éveillé que tout est possible. Et après, la réalité m'apparaît moins lourde, moins désespérée.
Il y a dans l'office du service de l'hôpital une citation de Proust scotchée au mur. Je la cite de mémoire : "
Nous sommes tous obligés d'entretenir en nous quelques petites folies pour rendre la vie supportable". Jamais situation n'a mieux correspondu à mon cas. Ma petite folie se nomme Althéa l'Amazone, et elle décapite un gobelin d'un seul coup d'épée !
Mais attention, n'allez pas croire que je mélange tout. Je sais bien que ce n'est qu'un jeu et qu'Althéa n'est qu'un nom et quelques chiffres sur un morceau de papier. Seulement c'est ma façon de combattre ma maladie et mes emmerdes, en rêvant qu'ils ont la peau verte et le nez écrasé et surtout en rêvant que moi, qui peux à peine monter une côte à pied, je suis capable de me battre pendant des heures et de vaincre ces problèmes en les décapitant.
ces sensations là, il n'y a qu'avec Laurence et Aude que je les ressente. Sans elles je suis foutu. D'autant plus qu'elles sont les seules à avoir l'attitude que j'ai moi-même face à la maladie. Elles l'acceptent, la comprennent, savent lorsqu'il faut que je m'arrête, mais elles ne me passent pas tout pour autant; elles n'ont pas pitié (c'est horrible la pitié), et elles ne me rejettent pas à cause d'elle. Et bien, à part d'autres mucos (et encore pas tous) qui ont évidemment à même de comprendre, j'ai rencontré très peu de gens qui réagissaient ainsi. pour cela et tout le reste elles sont les meilleures amies et je vais bientôt les revoir.

dimanche 16 mars 2008

Le "groupe muco" Y'en a marre ! J. Heuchel

le 16.03.90

La mucoviscidose est une maladie qui ne laisse aucun répit. Les soins sont quotidiens et indispensables si l'on veux tenir le mieux et le plus longtemps possible. Ici, pratiquement tout le monde a compris çà. Il y a trop d'anciens copains qui sont morts pour que l'on puisse se voiler la face. Et encore je ne viens ici que depuis un an. j'imagine le nombre de décès depuis 7 ans que viens Jean-Jacques...
Jean-Jacques qui justement est reparti chez lui ce matin. il en avais marre. Marre d'attendre ce greffon qui peut le sauver, marre d'être loin de ses copains d'Alsace, marre des perfusions, marre des conneries que l'on raconte le soir, marre des discutions qui tournent toujours autour des mêmes sujets, marre d'avoir raté sa chance quand il a été en extrême urgence, marre de dormir dans un lit d'hôpital, marre d'avoir sans cesse l'image de la maladie devant les yeux, quoi que tu fasses et où que tu ailles.
Il en a eu marre, et moi aussi je ne pense qu'à partir. Mais le problème c'est mon pneumothorax. S'il se redécolle loin d'un hôpital je risque d'y laisser ma peau. L'interne m'a dit qu'un pneumothorax suffocant (ce qui est rare qu'en même) peut tuer un mec normal en quelques minutes, alors moi !
Enfin, on verra bien. de toute façon si cela m'arrive alors que je suis en permission à Hyères, je serai aussi loin de l'hosto que de chez moi. Pour l'instant je vais essayer de sortir de l'ornière où je suis tombé sans me rendre compte.
Lorsqu'on arrive ici on est d'abord content de retrouver les copains hospitalisés. On se sent tous proches, liés les uns aux autres, et l'entraide fonctionne parfaitement si l'un de nous a un problème. Mais, à la longue, au bout de deux mois, la promiscuité finit par peser. Il est bon parfois de pouvoir s'isoler et de sortir du "groupe muco". d'autant que certains revenant toujours sur un éventail de conversations restreint (à savoir la greffe, la drogue et les soirées arrosées) finissent par dire toujours les mêmes conneries. Au départ on rigole, mais après cela lasse. Ou alors, et c'est pire, on entre dans le jeu et, le phénomène de masse aidant, on finit par s'abrutir et dégénérer.
Jean-Jacques est parti à temps. Avant d'être trop profondément pris dans l'engrenage. Avant que ce trinôme de conversations vous incite à vous laisser aller à la facilité : la rigolade et la bêtise qui sont les plus sûrs moyens d'oublier la maladie dans un milieu hospitalier. En déconnant ils ne pensent plus aussi sérieusement à leur état et ainsi ils se forgent un rempart de stupidité pour se protéger de l'issue. Mais au-delà d'un certain stade, c'est la bêtise pour la bêtise et là le rempart devient une prison pour l'esprit qui s'enlise dans un comportement enfantin, immature.
Là-haut, en Alsace, Jean-Jacques va pouvoir se ressourcer, remettre les choses au point et j'espère qu'il reviendra moralement plus fort que jamais pour affronter la dernière ligne droite avant la greffe.

vendredi 14 mars 2008

Enfin au boulot

Bon, rien à voir avec le journal de Johann.
Il n'y a ici aucun drame, aucune souffrance comparable à celle d'un être qui cherche à vivre et qui s'y accroche jusqu'au bout, en faisant un petit tour de France des hôpitaux. Son seul territoire de liberté se trouvant à Bosc le Hard, voir son seul lieu de prédilection, sa chambre, et il disait avoir de la chance, en rapport avec ce et ceux qu'il a pu connaître.
C'est grâce à mon cousin que j'ai pris conscience de la chance que j'ai depuis fort longtemps. Pourtant, un petit souci me travail quelque peu ces temps.
Voila, aujourd'hui je n'ai plus 20 ou 30 ans, et cette dernière année on m'as mis une alerte sur ma santé physique. Cela devient aujourd'hui, sérieux. J'ai hésité longtemps à lâcher le morceau, mais l'alerte est sérieuse, j'ai dû demander moi-même de reprendre le travail. Que se soit le médecin généraliste, le médecin conseil du CPAM, le médecin du travail, ils ont tous hésités à me remettre au travail. Quoique la médecine du travail est ici un service un peu olé-olé, s'appuyant sur des situations extrêmes pour crier gard ! En écrivant ceci, si ce médecin a eu une hésitation, dois-je comprendre que j'ai fait mes premiers pas dans la catégorie des "extrêmes" ? Je ne le pense pourtant pas. Bien qu'un peu fatigué ces derniers mois, les membres gauches lourds et douloureux lors d'efforts continus, comme au travail, par exemple, en usine avec des gestes répétitifs, je ne me suis jamais sentis aussi bien dans mon entreprise. trois mois et demi d'arrêt, des examens de ceci-cela à une cadence pire qu'à la chaîne, regrettant presque de ne pas être à se traîner au travail, car chose folle, la maladie est devenu un travail, je dirai, à trois quart temps. Visite chez votre médecin, les radios, les échos, les scanners, les infiltrations, les contrôles, le kiné, les papiers à remplir, les examens complémentaires ..., et tout ceci hors heures des sorties autorisées, devant faire 40 kms allé-retour avec un bras qui ne répond plus aux ordres donnés, avec des vertèbres cervicales raides mieux que la justice. Le monde médical est-il devenu aussi aveugle que cette dite justice ? Oh ! Ne déblatérons pas sur ces deux sujets, nous pouvons en avoir besoin à tous moment.
Mais enfin, je suis entré chez un médecin pour un simple mal d'épaule, j'en suis ressorti avec une supposition de polyarthrite et une alerte vasculaire. Le lendemain l'alerte a été confirmé, ainsi que la polyarthrite, sans même avoir eu une prise de sang. Une simple radio, principalement de l'épaule et du rachis, ont démontrés la présence de petits dépôts. Situation qui n'est pas nouvelle chez moi, je dois le dire, car j'ai déjà une exostose osseuse à un pied depuis bien longtemps.
Ceci n'expliquant pas cette raideur musculaire au niveau de l'omoplate, du trapèze, allant jusqu'au bicepse. Le tendon peut-être ? non, selon la visualisation des échos.
Là, la médecine a le bec dans l'eau ! Pas de problème de tendon, pas de nerf abîmé ou coincé, une circulation normale, une disparition casi soudaine de ces fameux dépôts sur les extrémités osseuses. Pourtant au bout de quelques efforts, l'inflammation de tous les muscles partant de l'omoplate jusqu'au bas du bicepse recommence de plus belle, avec fourmis dans la main, douleurs violentes et saccadées au bout des doigts, à la jonction bras-avant bras, douleurs casi permanentes à la cage thoracique comme si on vous écartait les côtes. Mais rien y fait, le diagnostique n'est pas seulement incertain, il est carrément inexistant, du moins à mon point de vue. J'ai donc choisi de reprendre le travail, je préfère souffrir à l'usine, plutôt que de souffrir et voir me tuer sur la route pour entendre dire les médecins, que mis à part les quatre petites tumeurs suborales que l'on vous a retirées, nous ne comprenons pas votre état. Vos muscles restent inflammés, mais nous n'y pouvons rien à l'heure actuelle. Alors changeons d'heure ! Ha ! Ha ! Ha !
Ce soir, vendredi, fin de semaine de travail, la douleur est à nouveau très présente, très pesante, toute l'épaule est inflammée, mes côtes me donnent l'impression d'appuyer très fort, m'obligeant à expirer prématurément. Je n'ai rien dis à Vottey, pourtant elle a bien remarquée qu'il y a quelque chose d'anormale, comme quand je me mouche, ce n'est que pour évacuer des caillaux de sang, je ne veux pas qu'elle s'inquiète, pourtant elle finira bien par ouvrir la page blog, ou il y aura bien un "couillon" qui ouvrira sa grande gueule. Elle est fragile, puis fatiguée par un travail qui ne lui plais pas, anxieuse de par ce que je soupçonne d'être un mal du pays. Je dois la protéger, la maintenir loin de mes souffrances de petit mari gâté, je ne dois pas réveiller son empathie envers mes douleurs, je déteste l'empathie, elle même me fait souffrir. Il me suffit d'être en présence de quelqu'un qui s'est cassé une jambe au ski, pour ressentir sa douleur. C'est à un point que je me suis même posé la question si mon état actuel ne serai pas dû à ce phénomène, au travers de la lecture du journal de mon défunt cousin, ne ressentirai-je pas ses propres douleurs ? Pourtant non, je n'ai ouvert son livre il y a seulement 15 jours, et mes douleurs ont commencées il y a 4 mois, et puis çà n'a rien à voir, rien de semblable. Non, c'est idiot. Je cherche, je cherche, mais je ne trouve pas, je suis assis devant mon ordi, les coudes sur les bords du fauteuil, j'appuie sur les touches du clavier à mesure de mes pensées, mais je ne trouve aucune réponse.
C'est curieux, j'ai une usure prématurée des L4-L5, mais je le sais et j'ai appris à vivre avec, j'ai une exostose, mais je le sais et ..., je suis amputé d'une partie d'un doigt, mais je le sais et ..., mais là, j'ai mal, çà gonfle, çà tire, à l'instant même que j'écris ces phrases, mon bras n'a presque plus de réflexe, comme il y a trois mois, les doigts deviennent raides; Cela ne me donne pas de sensation de peur, d'inquiétude, mais je me sens seul dans ma douleur, je ne sais pas ce qu'il en retourne, ce que je risque, quelle en est la finalité.
Je suis fatigué de cet état second, je n'arrive pas à me concentrer sur mon travail, j'ai du mal à interpréter les divers "incidents machine", à l'usine, ma vue baisse, moi qui avais toujours plein d'innovations en tête, pour l'amélioration des postes de travail, je suis aujourd'hui, comme lobotomisé, je me contente de "suivre le mouvement". Serai-je devenu un mouton de Panurge ?
Pour tout dire, j'ai annulé trois rendez-vous clients. Je ne peut pas me présenter ainsi. C'est la maison Diffusnet qui vas être contente. Mais je suis fatigué par cette épaule, ce bras.
Les anti-inflamatoires ne me font plus rien, seul l'ibuprofène en 400 mg me soulage un peu.
Le but d'exposer ceci ici, sur cette page, c'est de savoir d'une part, si quelqu'un a déjà eu un mal similaire, s'il s'en sort ou s'en est sorti, ou si quelqu'un est capable de mettre un nom même provisoire, sur cet inflammation chronique, pour aiguiller les futures visites chez le médecin, puis vers des soins appropriés.
Alors, si vous savez, si vous avez une idée, n'hésitez pas, envoyez-moi un mail.

mercredi 12 mars 2008

L'instinct de survie J. Heuchel


le 12.03.90

Jean-Jacques n'est plus en liste d'extrême urgence. Il a été momentanément écarté vendredi soir lorsqu'un malade intubé est arrivé à la Timone à Marseille, sans passer par Giens, pour une greffe de toute urgence. une fois de plus Jean-Jacques voit la date reculer. Il n'y a qu'un seul lit en service de réa post-greffe. Si l'inconnu est opéré et qu'il en sort, il encombrera le lit entre quatre et six semaines,ce qui repousse la greffe jusqu'à mi-avril au pire. Je dis au pire, car si l'inconnu meurt avant d'avoir un greffon, il n'encombrera le service adulte que quelques jours : vingt au plus.
Et c'est là que la lutte pour la vie est la plus âpre, la plus rude et la plus ignoble. Il faut tenir le plus longtemps possible pour avoir le maximum de chances d'avoir un greffon. Mais les places de réa à la Timone sont limitées. Les médecins ne nous disent pas exactement ce qu'il en est mais je crois qu'il y a deux lits enfants et un lit adulte. La convalescence d'une greffe dure en moyenne un mois. Mais parfois deux personnes ou plus sont en urgence et aucune ne peut tenir encore un mois. dans ce cas, c'est le hasard qui détermine lequel sera greffé. En fait, ce que je veux dire, c'est qu'après chaque greffe il faut compter au minimum un mois avant la suivante. Alors les malades sont en concurrence et on arrive à souhaiter la mort de l'autre. C'est dégueulasse, mais c'est l'instinct de survie. Cette mort vous gêne d'autant moins lorsqu'il s'agit d'un type que l'on a jamais vu...
Heureusement, Jean-Jacques peut encore tenir plusieurs mois. mais plus le temps passe, plus il s'aggrave, plus le moral baisse et plus l'opération est dangereuse. Il faut que tu saches, innocent lecteur uniquement tracassé par les choses matérielles, que seul Noircler accepte de greffer des gens qui sont si près de la fin qu'ils sont intubés. les autres chirurgiens (peut-être plus soucieux du pourcentage de réussite ?) n'opèrent plus à ce stade. quand on en est là, la greffe c'est vraiment la dernière chance. Le quitte ou double final, le dernier atout de la médecine.

dimanche 9 mars 2008

Un connard qui se croit meilleur que les autres; J. Heuchel

le 09.03.90

Une journée de plus pour Jean-Jacques à attendre. Il est en extrême urgence jusqu'à jeudi. L'attente devient pénible, no pas que Jean-Jacques aille mal, mais parce que chaque jour qui passe est un jour perdu. J'espère qu'il sera vite opéré et que tout se passera bien. C'est un ami, un vrai. Il attend depuis seize mois mais on ne peut rien y faire. Dans ces moments j'aimerai croire en Dieu pour au moins prier pour lui. Pourtant, mon éducation aurait dû me donner la foi. Dans une école catholique l'instruction chrétienne a beau être obligatoire elle n'est pas plus performante que le reste du système éducatif. En fait j'ai rejeté les chrétiens plus que Dieu. Il n'y a rien qui m'énerve plus qu'un connard qui se croit meilleur que les autres parce qu'il va à la messe chaque dimanche,alors qu'en dehors de l'église il se comporte en fils de pute. Il n'y a rien qui m'énerve plus qu'un prétentieux qui croit gagner un ticket pour le paradis en donnant chaque semaine une ou deux pièces aux clodos. Il n'y a rien qui me fasse plus peur que le fanatisme religieux ; l'intolérance du chrétien est souvent sans limite. "Dieu ou l'épée", ce n'est pas le message du Christ, que je sache. Je hais ces gens dont la vie est facile et qui sont sûrs que c'est la volonté divine qui les guide. C'est aisé de dire que la famine dans le Tiers Monde est là pour éprouver l'humanité quand on bouffe à sa faim. Et si telle est réellement la volonté de Dieu, il a une bien curieuse manière de concevoir l'amour. Pourtant, je ne pense pas que le monde, la vie, soient le fruit des lois mathématiques pures. Que l'intelligence soit éphémère et qu'il n'y ait rien après la mort. Quelqu'un ou quelque chose doit provoquer , non, le mot est inexact, disons créer les événements. Faute d'en savoir plus je le nommerai destin ou hasard. Attention je pense que l'homme est libre de choisir sa vie, ou du moins qu'il a souvent la vie qu'il s'est forgée (qu'il mérite ?).
Mais,si la vie a un sens, alors chacun d'entre nous doit avoir une tâche à remplir, une mission, un but. Pourtant quand je repense à ce qu'a été la vie de certaines personnes, je ne vois vraiment pas se qu'elle a pu apporter à part la souffrance et la douleur. A moins que cette souffrance ait été un destin.
Si tel est le cas, alors, comme Zadig, je ne comprends pas les desseins de la providence.
En attendant une éventuelle réponse je pense que chacun doit, en son âme et conscience, se choisir une ligne de conduite et s'y tenir du mieux qu'il peut. Chacun doit tenter de refouler la haine et la méchanceté qu'il a au plus profond de lui, pour devenir, par la force de sa volonté, un type bien. Rousseau avait tort, l'homme ne naît pas bon. L'homme naissant est une pourriture. Un homme qui vivrait hors d'une société ne serait sans doute pas un bon sauvage mais un être cruel, cupide, vaniteux, avide de pouvoir et de sexe.Seule la société, en enseignant la morale, peut permettre à un enfant de comprendre qu'il est abominable et gratuit d'arracher les ailes des mouches ou de les noyer dans l'eau bouillante. l'enfant est un monstre sans coeur, sadique et égoïste tant qu'il n'a pas fait l'expérience de la vie en société et des brimades. En réalité, plus que la société, c'est la civilisation qui permit à l'homme de ne pas vivre dans l'anarchie la plus primaire.
Bien sûr, de la vie en société naît la propriété et donc la jalousie, le désir d'amasser et l'exploitation de l'homme par l'homme. Mais cette exploitation est surtout réelle dans les pays pauvres, sous-développés. Elle n'est pas dû à la vie en société mais plutôt à un retard de civilisation. Bien sûr, le système actuel n'est pas la panacée mais c'est déjà un net progrès. Et si moi, muco, faible et malade, je suis en vie aujourd'hui c'est grâce à la science, mais aussi à la société qui accepte de m'aider et d'en payer le prix. M'est avis que chez les bons sauvages de Rousseau on m'aurait vite noyé dans un ruisseau pour ne pas traîner un enfant diminué.

vendredi 7 mars 2008

Mucoviscidose : La femme à la faux J. Heuchel

Le 07.03.90

Je suis descendu hier au deuxième étage du pavillon Coty, dans le service des adultes et des malades ne présentant pas de complications. Il faut savoir que l'hôpital Renée-Sabran se trouve dans un grand parc de 40 hectares. Il est divisé en plusieurs pavillons. Les mucos sont dans le pavillon de la pédiatrie (bien que certains d'entre eux soient adultes). C'est le pavillon René Coty. Le service du docteur Chalazette s'étend sur la majorité du bâtiment, mais il y a aussi des brûlés, des accidentés et des réveils de coma. Pour moi, descendre au deuxième étage c'est à la fois la liberté et la tranquillité. La liberté, car je ne suis plus alité et surveillé constamment. La tranquillité, parce que, n'ayant déjà pas la fibre paternaliste, je n'appréciais pas trop les débordements des tout petits.
Enfin, tout cela c'est du détail. En fait, hier, l'événement a été l'enregistrement vidéo que l'on a fait sur Jean-Jacques. Avec un caméscope on a filmé ses dernières volontés avant la greffe, en offrant la bande au média le plus offrant. C'était un délire d'humour noir. L'humour, c'est ce qui permet de tenir ici. Depuis que je viens à Giens, une dizaine de personnes sont mortes. Sur celles-ci j'en connaissais huit. Cela fait un choc lorsqu'on apprend que l'un des malades avec qui on a parlé, ri ou partagé un bon moment est parti pour un monde que l'on dit meilleur. Avant de venir ici, je n'avais pour ainsi dire jamais vu d'autres mucos. Je ne pensais même pas que la maladie était si rapidement mortelle. Et surtout je n'était pas habitué à la mort de mes proches, d'autant plus quand ceux-ci avaient environ mon âge. C'est l'humour, la dérision qui m'ont aidé. Je n'imaginais pas que l'on puisse rire de sa mort tout en sachant qu'elle risquait de survenir rapidement. Le seul type de ma connaissance qui est fait ça avant c'était Desproges.
Maintenant que je côtoie la femme à la faux, j'ose la regarder en fasse. Je ne suis pas prêt à me résigner, je ne le serai jamais, mais elle me semble plus familière et parfois préférable à une agonie inutile où l'espoir s'amenuise peu à peu comme une lumière dont la flamme achève de consumer le peu d'oxygène qui lui reste. La mort est une grande inconnue. Mais c'est aussi la seule certitude de cette vie. Le but ultime de l'humanité c'est sans doute de la comprendre ou de la maîtriser. Alors l'homme sera aussi proche que possible de ce qu'il faut bien (faute de vocabulaire adéquat) appeler Dieu. En attendant cet instant qui ne viendra peut-être jamais, chacun d'entre nous tente de comprendre le sens de cette putain de vie. Le pourquoi du hasard et de la destinée.
Si tout cela a un sens j'espère que l'on comprendra lorsque l'on sera de l'autre côté du mur. En attendant, la seule chose que l'homme peut faire, ou du moins tenter, c'est de devenir meilleur. La perfectibilité est une des plus belles qualité humaine. Elle est l'espoir d'accéder au bonheur que tout être recherche. En cela la maladie est une chance. Grâce à elle on évolue plus vite. La souffrance, physique ou morale, forge l'âme. Je pense dire sans me tromper qu'à 19 ans, alors que mes copains ne pensent qu'à leurs études et à la drogue, j'ai depuis longtemps dépassé ce stade pour m'intéresser à l'essentielle. Et cela seule la maladie me l'a apporté.

Mucoviscidose, quand tu nous tiens

Nous découvrons petit à petit les souffrances et les épreuves qu'endurent les "mucos" à travers le journal de Johann.
Mais les parents dans tout çà ? Que deviennent-ils ? Quelles épreuves vivent-ils ? Quelles sont leurs souffrances ?
Ils subissent tout de même bien des tracas.
> Déjà, savoir son enfant malade, c'est "douloureux"
> Lui faire subir ces satanés exercices de kiné, c'est horrible.
> Sans compter les perf., les prises de sang, biopsis, ... .
> Mais dès lors que l'on en arrive aux greffes, pour la survie de votre enfant, car il s'agit bien là de survie, là, des milliers de questions vous viennent à l'esprit, le monde s'écroule. Non pas qu'il ne s'est pas déjà écroulé auparavant, mais il s'effondre totalement.
> La guerre n'est pas perdue pour autant, mais les batailles font rage, le jour, la nuit, à tout moment, en permanence. La peur de perdre son enfant, à tout instant, est présente, pesante, constante. La vision de voir son fils dépérir est atroce.

Et pourtant, il ne faut surtout pas que l'enfant vous surprenne à pleurer pour lui, votre pitié le terrasserai d'autant plus. Ce n'est pas de la pitié qu'a besoin le "muco", mais de soutien moral, d'amour. Il faut le regarder, le choiller, l'aimer loin de la maladie. Ces malades sont déjà seuls dans leurs souffrances, alors pourquoi en rajouter ?
Facile à dire lorsque l'on est pas directement confronté à cette vie hors du commun.
Et oui ! C'est une vie ! Pire qu'une épreuve, pire qu'une simple appendicite, pire peut-être que l'emputation d'une main, pire que tout; Car vous êtes emputé de la vie que vous devriez avoir, ou plutôt que vous auriez aimé vivre.

Les parents subissent des pressions terribles, doivent se préparer à voyager jusqu'à l'autre bout de la France, sans en avoir envie et encore moins pour un petit voyage tranquille en famille. Ils doivent mener leur vie de travailleurs, en plus de s'occuper en permanence du devenir de l'enfant, ou au mieux, l'accompagner jusqu'au bout de sa courte existance.

20 ans de service, corps et âmes, voués uniquement à la survie d'un être cher. Imaginez sur 20 ans de votre vie, disons 18 ans qui ne vous appartiennent pas. 18 ans à donner 100% à votre enfant, acceptant, encaissant ses moindres sauts d'humeur, près à tout lacher à tout moment pour lui porter secours, pour le soutenir, l'accompagner, le soigner, être à son chevet, répondre à ses questions lorsque c'est possible. C'est ce que l'on fait tous les jours, nous parents d'enfants dit "sans problème", me direz-vous, mais imaginez celà multiplié au centuple, que vous n'avez pas un moment pour vous, ni pour vous reposer, ni pour avoir une pensée rien que pour vous, vous n'avez plus que la pensée d'un jour meilleur pour votre progéniture, votre cerveau est en ébulition permanente, jour et nuit, jour après jours, mois après mois, ... . Et cela sans même pouvoir et sans même avoir le droit de se relacher.

C'est tout un travail que l'on fait, que l'on ne peut faire que par amour des siens. Pourtant, Johann se sentait comme un "cobail de laboratoire", mais il avait envie de vivre, bien que conscient de la finalité des choses, à son époque. Il avait aussi conscience qu'il "ouvrait" la porte aux mucos suivant vers un espoir de voir des jours meilleurs.
Ces parents ne voulaient pas qu'il meurt et parte dans l'oublis. Aussi, ils ont trouvés son journal, l'ont fait publier pour l'immortaliser, pour donner espoir aux suivants. Johann connaissait sa fin et souhaitait sans aucun doute, que l'on oublie pas son passage sur terre parmi les mortels.

Merci aux parents courageux, malgré la douleur, qui ont su faire partager les réflections, l'évolution, les désillusions, les espoirs de leur fils.
J'ai envie de dire aux autres parents de muco, faites en autant. Si vous trouvez le journal de votre enfant, lorsque celui-ci vous a quitté, publiez ses témoignages, de ce que la maladie lui a fait vivre. C'est un moyen comme un autre pour faire connaitre cette maladie, attirer l'attention sur cette maladie, que les mucos voient la progression de la science et leur donner un moindre espoir.

A titre d'information :
> Il y a 1041 km qui sépare Bosc-le-Hard de la presqu'île de Giens.
> Entre Giens et Hyère, il y a 15 Km
> Entre Giens et l'hôpital de Marseille, 95 Km

mercredi 5 mars 2008

Ce sont les poumons qui sont pourris

05.03.90

Aujourd'hui Jean-Jacques Muller, un Alsacien et aussi le meilleur copain que j'ai ici, est théoriquement passé en liste d'urgence. C'est à dire que son nom est inscrit sur les Minitels de France-Transplant et d'Euro-transplant. Ainsi, dans tous les services de réanimation aptes à effectuer des prélèvements d'organes d'Europe l'on sait qu'il attend un greffon. A chaque instant, un simple coup de téléphone peut annoncer qu'un greffon a été trouvé et qu'il est compatible. Dès lors, il s'agira pour Jean-Jacques d'arriver le plus vite possible à l'hôpital de la Timone à Marseille, où le chirurgien, M. Noircler et son équipe commenceront l'opération. Cette attente est très éprouvante. En un instant il lui faudra nous quitter et foncer là-bas toutes affaires cessantes. cependant, la véritable attente, celle de la dernière ligne droite, ne commencera que demain., voire après-demain, une fois que Jean-Jacques aura fait la scintigraphie cardiaque qui décidera s'il lui faut un greffon coeur-poumons ou poumons simples. Eh oui ! Rien est simple au royaume de la muco. Au départ, ce sont les poumons qui sont pourris. Mais une trop mauvaise respiration, trop longtemps compensée par un rythme cardiaque trop rapide, peut entraîner de dangereuses lésions de ce dernier. Pour Jean-Jacques le verdict tombera demain, ou (si son cas est litigieux) un peu plus tard, après que les chirurgiens aient examiné les résultats.
Quant à moi, après avoir fait des pneumothorax à répétition depuis décembre, on m'a enfin enlevé à midi le dernier drain qui sortait de mon flanc. Maintenant il ne reste plus qu'à espérer que mon poumon tienne à la plèvre le plus longtemps possible. Le pneumothorax j'en ai vraiment eu ma dose : trois en trois mois, méchante moyenne ! Cinq drains et trois semaines d'alitement. J'ai failli craquer. heureusement, ce soir j'ai eu la permission de sortir de l'enceinte de l'hôpital. J'ai été voir à Hyères un documentaire sur la Guyane. Je croyais me changer les idées, mais non. En voyant les indiens Guyanais chasser, je n'ai penser qu'à deux choses : comment font-ils pour s'en sortir s'ils font des pneumos ? Et comment peut-on trouver de la Cyclosporine là-bas, en pleine forêt tropicale ?
Décidément, même si Giens n'est pas un hôpital comme les autres, il reste un hôpital. Et je crois bien que rentrer un mois chez moi me changerai un peu les idées. Quoi qu'il en soit, je reste jusqu'à ce que Jean-Jacques parte pour la greffe.

mardi 4 mars 2008

Johann H., l'hymne à la vie, à la mort

Johann adorait ce qui touchait "au délire". Non pas par folie, mais certainement par besoin d'extérioriser son MAL Profond. Une souffrance délirante, qui lui faisait oublier sa délirante souffrance. The Wall ( Le mur ) pour les analphabètes.
De quoi je parle ? Regardez plutôt l'extrait ci dessous, des Pink Floyd :


Journal de Johann Heuchel

le 28.02.90

Je m'appelle Johann Heuchel, j'ai 19 ans, j'habite au 518 rue Villaine, Bosc-le-Hard ( Normandie), et aujourd'hui j'ai rencontré l'homme de la dernière chance. Il se nomme Michel Noirclerc.

le 02.03.90

Cela fait 2 mois ce matin que j'ai quitté la maison,. Je me souviens très bien de ce mardi. Le matin, après avoir regardé une vidéocassette de Meurtre dans un jardin Anglais, j'ai rassemblé mes derniers effets personnels - quelques photos, trois ou quatre romans, deux cassettes des Eurytmics -, j'ai rapidement déjeuné, et Yannick et moi sommes partis. On a retrouvé Colette à Rouen, pris le train pour Paris-Saint-Lazard. de là, un taxi nous a emmenés chez le Docteur Feigelson. Tous les quatre, nous avons mangé un couscous dans un petit resto du dix-septième et, quelques minutes plus tard, mes parents reprenaient le train pour Rouen.
J'ai dormi dans la salle d'attente du cabinet médical. C'était ma première nuit de l'année hors de chez moi. C'était la nuit du 2 au 3 janvier 1990.
Le lendemain, mon pédiatre et moi prenions l'avion pour Hyères, la ville d'Hyères-les-Palmiers. Hyères près de Toulon, un lieu de vacance idéal pour le Français moyen. Mais Hyères, près de la presqu'île de Giens, c'est aussi un lieu de repos pour le muco moyen. Si je suis venu sur la Côte d'Azur en hiver, ce n'est pas pour me ressourcer après une déception sentimentale, c'est pour sauver ma peau.
Car vois-tu, lecteur, je ne suis pas un homme comme les autres. D'aspect, j'ai l'air normal. Peut-être un peu maigre pour un enfant de 14 ans, penseras-tu en me voyant. Peut-être ai-je une petite grippe qui n'en fini pas, croiras-tu en m'entendant respirer et tousser. Mais rien de tout cela n'est vrai.
En réalité, j'ai la mucoviscidose.
Voilà. C'est dit. Le mot est lâché. Maintenant tu es mon confident, lecteur, maintenant, tu es dans le secret des Dieux.
Maintenant, tu sais que je dois lutter pour survivre et tu sais que cette lutte ne finira qu'avec la mort. Maintenant, tu sais pourquoi je suis venu sur la presqu'île de Giens à l'hôpital Renée Sabran, dans le service du docteur Chazalette.
Comment ? Je lis une lueur d'incompréhension dans tes yeux. Tu ne connais pas la mucoviscidose ? Et bien tu ferais mieux de t'en réjouir ! Écoute, un jour je te raconterai par le menu les symptômes et les conséquences de cette maladie. Pour l'instant, sache seulement qu'elle ne se transmet que des parents à enfants. C'est une maladie génétique, héréditaire en somme. Sache aussi qu'elle encombre les poumons d'un mucus si épais qu'il empêche la respiration et qu'elle est mortelle à plus ou moins longue échéance.
J'ai 19 ans, mon seul espoir d'en avoir un jour 30, c'est de me faire greffer des poumons sains. En fait, si cette opération ne peut pas se faire dans l'année, il y a de fortes chances pour que je ne voie pas le prochain mois de mars.
C'est pour cela que j'ai décidé d'écrire ce journal.
Parce que je pense que la vie vaut le coup d'être vécue et que si je ne suis plus là pour écrire dans un an, je vivrai encore à travers ce que j'écris aujourd'hui.

le 04.03.90

L'hôpital de Giens n'est pas un hôpital comme les autres. Et j'en ai vu des hôpitaux ! Cet hôpital a beau être à la pointe de la médecine moderne, il ressemble plus à une grande maison où chacun fait partie de la famille. Les malades reviennent périodiquement pour des cures d'antibiothérapie et finissent par tous se connaître. Ils forment une petite communauté, une bande de copains unis par la maladie, la douleur, mais aussi l'espoir, qui ne ressemble à aucun autre. Chacun étant intimement conscient de l'éphémérité de sa vie vit d'une façon tragiquement intense qui confère à chaque moment agréable une force que l'on ne retrouve nulle part ailleurs.
Les infirmières et les soignantes sont elles aussi comme des membres d'une famille. Elles sont un peu les mères des malades qui viennent ici depuis longtemps. Elles sont celles qui côtoient le plus les malades et partagent même parfois leurs loisirs avec les nôtres. Oui, ici ce n'est pas un hôpital et pourtant dans chaque pièce des gens sont morts. Le dernier, un enfant qui avait juste 15 ans, est décédé il y a à peine trois semaines. C'est un pied de nez du destin quand on pense que ce même enfant disait il y a un an, juste après sa greffe, que celle-ci lui faisait voir les choses différemment. En fait, quelques mois plus tard, des problèmes dont je ne sais rien de sûr juste quelques rumeurs) l'ont obligé à retourner à Giens pour finalement y mourir. Il lui fallait une seconde greffe ! Voilà le vrai problème : la greffe seule peut nous sauver, mais l'on peut mourir pendant l'opération ou après faire des rejets (eux aussi mortels) sans parler des complications éventuelles.
De là naît tout le piment de la chose. C'est un dilemme constant auquel est soumis l'esprit. D'un côté la greffe est salvatrice et on la souhaite de toute nos forces. Et de l'autre elle reste risquée et dangereuse. d'un côté on peu mourir en attendant un greffon qui ne viendra peut-être jamais. Et de l'autre on peut mourir sur le billard alors que l'on avait encore plusieurs mois à vivre. J'ai des amis qui sont morts des deux façons. Heureusement, j'ai aussi des amis qui ont survécu et qui vont bien. Entre les deux, ma raison et mon coeur balancent, oscillant entre le fatalisme et l'espoir. Ce journal sera l'histoire de cette oscillation.

lundi 3 mars 2008

Mucoviscidose ou Fibrose Kystique

Voici de bien vilains mots qui ne parlent pas à grand monde. Des mots, pourtant, qui tuent chaque années, chaque mois, chaque jours, dans un effroyable silence. L'on a bien créé des centres hospitaliers pour tous ceux qui souffrent de cette infâme maladie qui vous asphyxie un peu plus chaque jour, qui vous détruit à chaque heure, dont la seule issue est fatalement, encore aujourd'hui la mort. Ces jeunes du"clan mucos" survivent pour mieux attendre la mort, il ont leur destin tout tracé, il connaissent dès leur petite enfance leur finalité et ne passent leur courte vie qu'à préparer leur "départ". Et pourtant, Nous, mortels indécis, idiot et trop matérialiste, possessifs, jaloux du voisin, nous nous efforçons d'ignorer la mort, alors qu'à travers tous ces jeunes dont même l'heure qui suis peu leur être fatale, nous pourrions apprendre tant de choses, tant d'amour, tant de tendresse, faire justement la part entre l'amitié et la aine, la peur et le réconfort, l'humanité et l'anarchie, vouloir que son voisin vive, vouloir que son voisin meurt, enfin, faire resurgir l'instinct de vivre.
Macabres écritures, n'est-il pas ?

Pourtant, si vous lisez ce livre que Johann nous a laissé en héritage, vous vous y accrochez inévitablement, autant il peut-être triste, autant il est tellement vrai, attachant, et comble de l'ironie, malgré la mort au bout du chemin, il sais par moment être drôle, ou faire rire, du moins faire sourire.

""La vie se joue déjà suffisamment de moi pour que je ne joue pas avec elle !
Par contre, un jour je niquerai la mucoviscidose !""
Johann Heuchel le 26.04.1990

Voilà, dès demain mardi 04 mars, je déposerai sur ces pages de blog, des extraits de ses écritures, de son journal intime, avec l'aimable autorisation de son père, qui est aussi mon oncle.
A savoir que ces extraits ne seront pas permanent sur le blog, car je ne vais pas réécrire son livre, je n'en ai aucun droit. Mais débattez, faites des commentaires sur le chapitre qui sera inscrit. Je pense en inscrire trois ou quatre à la filé, puis je ferai un "roulement", tous les 7 jours, je pense.

Alors, rendez-vous demain !

dimanche 2 mars 2008

Johann HEUCHEL, sa mémoire


Cette semaine, nous n'avons rien de bien important à raconter; Lisa évolue à un bon ritme, Vottey attend les résultats de la chambre du Commerce, pour son futur stage, quant à moi, même le médecin conseil du CPAM a été incapable de me dire si je pouvais ou non reprendre le travail ce lundi.
Ou va la médecine ? Serai-t-elle à nouveau un immense champ de charlatan ?
Je verrai avec mon médecin généraliste, ce lundi, si j'obtiens l'autorisation de reprendre le travail, et sous quelle condition. Tout ça, pour un mal à l'épaule, avec des muscles qui n'ont décidément pas envies de se redétendre.

Alors aujourd'hui, nous faisons un petit clin d' oeil à la mémoire d'un cousin disparu en 1992. Johann Heuchel, fils de Colette et Yannick. Je met un lien à disposition permanente, sur ce blog, vers les éditions Decitre.
Et ci-dessous, un petit résumé très parlant, pour un journal très touchant, au quel on ne peux rester indifférent.

Résumé de : Je vous ai aimé
"Ce soir j'écris.
Je témoigne que la mort est cruelle et que la vie n'est pas un chemin de rose. Je témoigne que la vie est trop courte pour n'être pas sacrée et vécue avec intensité. Je témoigne que l'amitié est ce qui la rend si belle et qu'un jour l'amour la transcendera. J'aime, je vis, je pleure, je ris. Je sais, je ne sais plus, je joue, je parle, je prie, je ne meurs pas, je ne meurs plus !"
Vous avez entre les mains, le journal de Johann. Il l'a écrit pour vous, et pourtant, c'est un journal intime, le plus intime qui puisse exister. Il y affronte l'expérience devant laquelle on est toujours, au bout du compte, seul. En 1992, à vingt et un ans, il est mort de mucoviscidose.

Johann Heuchel était un adolescent avec la Fibrose Kystique qui a écrit un livre à propos de lui-même et de la maladie, avant et pendant qu'il mourait en 1992, au moment de sa deuxième transplantation pulmonaire. Le livre est dur, et vient de l'intérieur. Ce n'est pas une simulation, comme d'autres livres. Ici, c'est la vie et la mort, en réel...Livre grand format.

Il voulait être journaliste. Il était amoureux d'une fille qui a subit elle-même une greffe du même type et qui parait-il, vie toujours grâce à ce progrès de la science.
A très bientôt !