mardi 26 août 2008

Humanisme J. Heuchel

le 26.8.90-dimanche

Il est 1 h 08. Je suis seul dans ma chambre, comme au bon vieux temps, il y a moins de six mois. ici les "aoûtiens" partent les uns après les autres. seuls vont rester ceux qui habitent les environs et ceux qui vont aller en Corse. L'interne, un nouveau, m'a prévenu : si mes résultats ne s'améliorent pas, je ne pars pas pour l'île de beauté. Moi qui croyais être en forme ! Enfin, c'est un nouveau. Peut-être n'a-t-il pas pris l'habitude des résultats pré-greffe. Il n'a pas connu Jean-Jacques, lui !
Ce sacré Jean-Jacques. Il est toujours en réa à Marseille, mais ses problèmes nerveux (des crises de convulsions) sont, paraît-il en bonne voie de guérison. Il est toujours dialysé un jour sur deux.
Guy serait toujours entre vie et mort. Et je n'ai pas de nouvelles de René-Dominique.
Par contre, j'ai des nouvelles du monde. La crise du Koweït préoccupe tout le monde. C'est la première fois, depuis que je viens à Giens, que le journal télévisé est regardé tous les jours par plusieurs personnes. Il faut dire que la situation est "très tendue", comme disent les journalistes. L' ONU a autorisé hier l'emploi de la force pour faire respecter le blocus. Saddam Hussein a fait encercler les ambassades du Koweït qu'il juge désormais inutiles. de part et d'autre, on menace de donner l'assaut.
J'ai un curieux sentiment envers cette guerre. Je la redoute et la désapprouve. Je n'aime pas les militaires même si je les juge indispensables, et je suppose que le monde n'a pas besoin d'une troisième guerre mondiale (même si l'ennemi commun est l'Irak).
Pourtant, paradoxalement, je suis dans un état d'excitation extrême à la pensée d'une guerre. Une sorte de joie d'imaginer l'Irak prendre une raclée, mais surtout une jubilation malsaine de voir "pour de vrai" les cascades du cinéma. Une envie de détruire et d'humilier les Irakiens. Sans doute ce que l'on nomme l'exaltation du combat... Curieux état d'esprit qui fait que moi-même, je ne sais pas ce que je ferais si j'étais le Dieu du Bébête Show. Négocier pour épargner des vies ou attaquer pour éviter un engluement du conflit et une éternisation de la crise ? Appliquer à la lettre les principes qui sont les miens, quitte à risquer, finalement, de ne rien régler et de simplement différer l'inévitable ? Comme en 39, lorsque Hitler a eu tout le temps de préparer son pays à la guerre. Jusqu'où aller au nom des principes ? La fin justifie-t-elle les moyens ? Des questions auxquelles il est impossible de répondre une fois pour toutes et qui sont, finalement, à la base des maux de l'humanité.

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